18 août 2024 — Sommet de l’Alpe d’Huez, dernière étape du Tour de France Femmes
Le sommet de l’Alpe d’Huez. Un lieu mythique du cyclisme, où tant de légendes se sont écrites, où la pente et la foule dessinent la frontière entre grandeur et effondrement.
C’est ici, lors de la dernière étape du Tour de France Femmes 2024, que Katarzyna Niewiadoma a vécu un moment suspendu, un instant de vérité.
L’attente, l’incertitude, le poids d’un Tour
Sur cette photo, Kasia est assise au sol, casque encore vissé sur la tête, les mains sur le crâne. Autour d’elle, les journalistes s’agitent, les objectifs fusent. Et pourtant, tout semble silencieux.
Ce moment, je l’ai attendu, guetté. Je cours vers elle juste après son passage sur la ligne. Elle est là, seule dans la foule, prise dans l’étau de l’incertitude. Elle ne sait pas encore si elle a remporté le Tour.
Demi Vollering, son éternelle rivale, a franchi la ligne en solitaire pour remporter l’étape avec 1 minute et 1 seconde d’avance sur Kasia Niewiadoma (Tour de France Femmes).
L’attente des temps officiels est insoutenable. Elle n’a plus de prise sur rien. J’observe, accroupi, prêt à saisir l’instant où tout bascule.
Et puis, la nouvelle tombe : Kasia Niewiadoma est la grande gagnante du Tour de France Femmes 2024. Pour seulement 4 secondes. L’un des plus petits écarts de l’histoire de la course (Tour de France Femmes).
Là, elle craque. Elle pleure. Je capture les larmes, le soulagement, le triomphe.
Une image arrachée au chaos
C’était la toute première fois que je travaillais sur un événement d’une telle ampleur. Un moment particulièrement fort pour moi, car je baigne dans le Tour de France, qu’il soit masculin ou féminin, depuis mon enfance.
J’y ai souvent assisté, en famille, et je crois pouvoir dire que je n’ai presque jamais raté une édition.
Alors, me retrouver au pied de l’Alpe d’Huez, au volant de ma propre voiture, sur une route fermée, avec les spectateurs massés de chaque côté, m’a donné des frissons.
J’ai repensé à ces années où, avec ma famille, j’attendais des heures durant sur le bas-côté pour voir passer ces mêmes véhicules.
Cette fois, c’était moi qui passais devant les regards d’enfants, appareil photo en bandoulière. Et qui sait ? Peut-être que parmi eux, un jour, un gamin prendra ma place.
Le Tour de France, c’est aussi ça : une transmission générationnelle, une passion qui se transmet d’un regard à un autre.
Et un jour, j’espère pouvoir aller encore plus loin : couvrir le Tour de France, masculin comme féminin, depuis une moto, en tant que photographe officiel pour ASO. Ce serait un rêve, et une sacrée consécration dans ma petite carrière de photographe.
Mais une fois redescendu dans le feu de l’action, la course a repris le dessus.
Photographier cet instant n’a pas été simple. Ce genre de moment est rare, précieux, et attire une forêt d’objectifs.
L’ambiance est tendue, presque violente. Dans ce métier, il y a de la compétition, mais rarement autant de brutalité que ce jour-là.
Alors que je suis accroupi, concentré, un photographe me bouscule violemment à l’épaule pour me déloger. Un coup, sans parole.
Chacun pour soi, tous les coups sont permis.
Mais je tiens bon. J’ai trouvé ma composition, mon émotion, ma lumière.
Détails techniques
Pour cette séquence, je travaille avec mon Nikon Z8 fraîchement acquis, et le NIKKOR Z 70-200mm f/2.8 VR S, une combinaison redoutable de réactivité et de piqué.
Ouverture à f/2.8, vitesse à 1/1250 s, un choix volontaire pour éviter tout flou de bougé sur une éventuelle célébration ou un geste brusque.
L’arrière-plan se fond dans un flou doux, pendant que le regard est happé par le visage à la fois tendu et soulagé de Kasia.
Le sacre d’une guerrière
Kasia Niewiadoma n’est pas une inconnue du peloton. Née le 29 septembre 1994, la coureuse polonaise de l’équipe Canyon//SRAM Racing est depuis des années une des figures emblématiques du cyclisme féminin.
Longtemps placée, souvent sur le podium, elle était jusqu’alors la « reine sans couronne », multipliant les deuxièmes places sur les plus grandes courses.
En 2023, elle avait déjà impressionné en remportant la première édition de la Women’s World Tour Gravel (CyclingNews).
La toute première fois que j’ai photographié Kasia, c’était sur le Tour Cycliste International Féminin de l’Ardèche (TCFIA), où je suis photographe officiel depuis plusieurs saisons.
Elle y avait brillamment remporté le classement général en 2018.
Mais c’est ce Tour de France Femmes 2024 qui marque un tournant dans sa carrière.
Une victoire à la régularité, à l’usure, à la stratégie. Une victoire méritée.
Une scène gravée
La photo de Kasia, les mains sur le casque, est devenue pour moi une métaphore.
Celle de l’abandon du corps, mais de la victoire de l’esprit.
Une respiration entre le doute et la gloire. Un répit offert à une guerrière qui, l’espace d’un instant, a enfin le droit de relâcher la pression.
Sources
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